Moyen-Orient

Episode 13. Ma vie au Moyen-Orient au volant d’un camion

Notre lignard du Moyen-Orient, Double Mètre (Jean-Louis Delarue), nous parle cette semaine du Bolu. Un col que tous ceux qui empruntaient la route au Moyen-Orient connaissaient, une institution.

Le Bolu surprenait à chaque instant

Le Bolu, surnommé ainsi, était un col, d’apparence facile en été, mais l’hiver il nous réservait bien des problèmes majeurs. Au pied de cette montée, nous étions à peu près au niveau de la mer, en haut nous étions à 900 mètres, pas de quoi fouetter un chat. La surprise résidait dans les kilomètres de montée, juste une dizaine de kilomètres, ce qui faisait que nous escaladions dans des 10% de moyenne, car il y avait des plats, mais aussi des marches au nombre de trois Sur le côté gauche, il y avait des parkings où nous nous arrêtions sur le dernier pour casser la croute. Sur le coté droit, il y avait des vendeurs de calles en bois pour camions, des sceaux confectionnés aussi en bois, et du « Bal » la traduction du Bal, c’est du miel.

Lors d’une escalade en plein hiver, je me souviens d’avoir assisté à une scène qui m’a laissé songeur. Nous avions chainé juste avant la montée, mais dans le col des camions turcs étaient à l’arrêt du fait que leurs chaines étaient de mauvaises qualités. Et certains n’avaient pas de chaines du tout, et avaient essayé de montée en espérant surement qu’ils pourraient passer, mais les conditions climatiques les ont obligé à s’arrêter dans la montée. Ils avaient callé leurs camions, et la police avait réuni des conducteurs le long de cette montée, température moins 20°. Les policiers les avaient obligés à rester debout en attendant la sentence. Comme nous étions en attente de pouvoir continuer notre route, nous avons pu assister à la conclusion policière. Chaque conducteur fut giflé violement et ils ne bougèrent pas et ne dirent rien. Puis les policiers leurs demanda de garer leurs véhicules en marches arrière, ce qu’ils firent et nous avons poursuivi notre route, en espérant qu’au démarrage nos chaines tiennent bon.

Dans ce col, nous avons eu une autre aventure Comme nous étions malgré tout plus puissant que les camions turcs, nous pouvions les doubler sans trop de problèmes. Mais ce jour-là, un Turque ne voulait pas se laisser doubler. Aussitôt que nous tentions, il faisait de sorte de nous emmener sur la gauche et surtout sur la voie descendante. Comme nous étions plusieurs, le jeu à consister de tenter de le doubler et donc il se passa, comme nous l’avions prévu de nous emmener à gauche pendant ce temps les copains doublaient à droite. Voyant notre manœuvre, il se résolut à se rabattre et donc à rouler normalement, mais nous avions parmi nous un camion qui était conduit par « Daddy accompagné par Daddye ». Daddy qui était passé dans les premiers avait garé son camion sur le parking casse-croute et attendait tranquillement au milieu de la route le chauffeur turc qui montait au pas. Arrivé à la hauteur de Daddy, il eut la surprise de voir notre compagnon s’accroché avec une main à son rétroviseur et avec l’autre main de voir un couteau de parachutiste venir se mettre sous sa gorge, ne parlant pas la langue du pays, le geste a suffit pour lui faire peur. Puis tranquillement, notre ami regagna la table et commença son casse-croute. Environ dix minutes plus tard, une voiture de police vint se garer sur le parking, et un policier nous demanda nos fiches de police et repartit avec, et de nouveau dix minutes plus tard, la voiture revint, et le policier nous demanda de le suivre avec nos camions. Nous avons redescendu le col et nous nous sommes retrouvés en prison au village du Bolu. Nous avons commencé une partie de tarot, car nous n’étions pas très inquiets. Vers dix sept heures, un colonel de la Gendarma avec un interprète vint nous questionner sur les raisons du geste de Daddy, et devant l’unanimité de nos propos il obligea le chauffeur turc, qui lui aussi était toujours présent, à s’excuser en nous donnant l’accolade. Seul Daddy fut, si je puis dire, pénalisé car il perdit son couteau pour satisfaire la demande du colonel. Nous avons remonté le col, puis nous avons filé vers Ankara.

La route vers la capitale de la Turquie n’était pas très facile, car nous étions dans une région montagneuse. Il y eu une succession de petits cols, et donc de descentes, avec des camions turcs très souvent en surcharge, exemple un bull sur un quatre roues c’était monnaie courante. Et quand nous arrivions derrière ces véhicules nous devions faire attention pour doubler surtout lors de notre premier voyage, car par la suite nous avions pris certaines habitudes, qui au regard de notre conduite française, passaient pour très dangereuses. Doubler sans visibilité, ne pas respecter la ligne blanche était devenu pour nous une seconde nature. Il nous fallait faire preuve de courage qui avoisinait parfois la folie, car combien de fois nous nous sommes retrouvés nez à nez avec un camion, et pourtant nous passions celui que l’on doublait roulait sur les bas coté de la route, et celui qui venait en face faisait de même. Et nous passions au milieu.

Comme nous sommes arrivés Cherby et moi, nous avons été surpris, car cette ville ne ressemblait en rien d’avec celle de maintenant Un voile de fumée surplombait cette cité, pour une cause, la majorité des habitations étaient chauffées au charbon, de plus comme nous sommes arrivés à la nuit tombante, nous avons pu remarquer que l’alimentation électrique était en 110 vols, et de loin nous pouvions voir les lumières de la ville clignotées. Il nous fallait faire demi-tour pour aller se garer à l’Ömur notre parking du soir. La température avoisinait les moins 15°, par soucis de protection nous avons laisser les moteurs tournés pour éviter la paraffine dans les réservoirs.

Ce parking n’a jamais eu la notoriété du Londra, et pourtant c’était une place tournante, car deux directions possibles vers l’est de l’Iran et vers le sud de l’Irak mais aussi la Syrie, puis la Jordanie, puis l’Arabie Saoudite, et plus loin les Emirats, et ne pas oublier le Liban. Il y avait aussi une petite zone où nous pouvions nous faire dépanner en cas de besoin et où s’installa par la suite le camion de dépannages Saviem. Souvent le lendemain matin au départ, nos routes se séparaient, certains vers le sud et d’autres vers l’est.

Jean-Louis Delarue

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