Actu

Paquet mobilité : les syndicats alertent Elisabeth Borne

photo ETF

A une semaine du Conseil des ministres européens des transports, les syndicats des salariés du transport routier de marchandises tirent la sonnette d’alarme auprès de la ministre des transports Elisabeth Borne. En cause :  les propositions de la présidence autrichienne de l’UE ne sont pas acceptables en ce qui concerne le temps de conduite et de repos et le repos hebdomadaire en cabine. Une délégation de dix représentants syndicaux a été reçu par la ministre en fin de semaine dernière pour plaider en faveur d’un volet plus social du paquet mobilité.

Le compte n’y est pas. C’est en substance le message qu’a souhaité transmettre la délégation de syndicats de salariés du transport routier reçue le 22 novembre  par la ministre chargée des Transports, Elisabeth Borne. Un front syndical uni, dix représentants au total (ETF, CFTC, FNST CGT, FGTE, CFDT, FO, UNSA), pour démontrer  à la ministre française que les propositions de la présidence autrichienne de l’UE pour le volet social du Paquet mobilité, discutées à Bruxelles le 3 décembre lors du Conseil des ministres européens des transports, ne sont pas acceptables.

« Les avancées qui sont sur la table ne sont pas recevables en l’état notamment pour ce qui concerne  le repos obligatoire après deux semaines de conduite et le repos hebdomadaire en cabine, affirme  Roberto Parrillo (photo), le  président de la section transport routier auprès de la fédération européenne des travailleurs des transports (ETF). Il faut absolument que le chauffeur routier ait droit à un repos de 45 heures au bout de deux semaines de conduite. Supprimer cette obligation de 45 heures, c’est légaliser le dumping social. »

Deux  autres  propositions examinées par le Comité des représentants permanents (Coreper), les ambassadeurs des Etats membres, risquent  d’être avalisées le 3 décembre et sont contestées par les syndicats. Elles concernent d’une part le repos hebdomadaire en cabine et d’autre part le retour des conducteurs à leur domicile. Force est de constater qu’une cabine se réduit à 4 m2 dont 80 % est occupé par le tableau de bord, le siège conducteur et la couchette. Autoriser le repos hebdomadaire en cabine est contradictoire au règlement social européen 561/2006, lequel stipule que le repos « signifie une période ininterrompue durant laquelle le conducteur peut disposer librement de son temps. » Si le conducteur ne remplit pas cette condition, son repos hebdomadaire en cabine correspond à du temps de travail et doit être comptabilisé en conséquence. La présidence autrichienne de l’UE soutient par ailleurs que le pays de résidence des salariés pour les trajets retours doit être l’Etat où le siège social de l’entreprise est établi. Or, les conducteurs roumains et bulgares par exemple travaillent souvent pour des entreprises slovaques ou tchèques. Résultat, ils se déplacent à plus de 1 000 kilomètres de leur domicile pour livrer les marchandises. Afin d’instaurer des conditions de travail décentes pour ces conducteurs, l’ETF milite en faveur du pays de résidence du conducteur et propose une fréquence moyenne de retour de trois semaines.

Des contrôles impossibles. Pour étayer son argumentation, la délégation syndicale a  pris l’exemple d’une société de transport roumaine qui  emploie des conducteurs roumains rémunérés aux conditions salariales de la Roumanie pour effectuer des trajets réguliers France-Espagne et Espagne-France. « Nous avons démontré à la ministre que rien n’était prévu pour lutter contre ce type de concurrence déloyale parce que le chronotachygraphe ne permet pas d’enregistrer le passage aux frontières, insiste  Roberto Parrillo. Il faudrait intégrer un logiciel qui remplacerait la longitude et la latitude par la fonction  passage aux frontières. » Pour l’heure, l’arrivée sur le marché des chronotachygraphes 2ème génération dit “intelligents” n’est pas prévue avant 2024. Autant dire que le contrôle des temps de conduite et de repos pose question à moins que le délai de mise sur le marché des chronotachygraphes “intelligents” soit avancé.  Tout se passe comme si les conditions actuelles de travail des conducteurs routiers européens allaient  à l’encontre du slogan du Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker,  prononcé lors de son discours  en juillet 2014 : « A travail égal, salaire égal ».

En présence des membres de son cabinet dont Jonathan Gindt, son conseiller diplomatique, la ministre des transports a martelé avec vigueur qu’elle souhaitait défendre la compétitivité du TRM français et lutter contre le cabotage illégal. « La ministre est arrivée avec des certitudes mais a quitté la réunion plus tard que prévu avec des questions », résume Roberto Parrillo.

La voix de la France pèsera-t-elle lors du conseil européen des ministres des transports le 3 décembre ?  Mieux vaut un « no deal » qu’un mauvais accord sur le volet social du paquet mobilité !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *