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« Les camions risquent d’être laissés pour compte dans les plans de relance » Eric-Mark Huitema, DG ACEA

Alors que Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, et Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, réuniront aujourd’hui les acteurs de la filière automobile, dans une interview, Eric-Mark Huitema, directeur général de l’ACEA, tape du poing sur la table estimant que « de nombreux décideurs politiques semblent oublier les véhicules lourds. » Rappelons que le Plan de relance automobile français a totalement oublié le poids lourd dans ses propositions.

« Maintenant que les initiatives nationales et européennes pour soutenir l’industrie automobile prennent lentement forme, il me semble vraiment que de nombreux décideurs politiques semblent oublier les véhicules lourds » a déclaré  Eric-Mark Huitema avant d’ajouter : « alors que les chauffeurs routiers se sont assurés que de la nourriture et des médicaments nous étaient livrés pendant la crise du COVID-19, leurs véhicules sont maintenant trop souvent négligés dans les plans de relance, qui se concentrent principalement sur les voitures particulières. »

Mesures insuffisantes pour les véhicules industriels

Eric-Mark Huitema est revenu sur les propositions faites par son organisation concernant le secteur du poids lourd : « comme vous le savez, l’ACEA a appelé activement à l’introduction d’incitations à l’achat à l’échelle de l’UE, dans le but de stimuler la demande à la suite de la crise COVID-19. Nous sommes cependant déçus de constater que plusieurs des plans nationaux visant à stimuler le renouvellement de la flotte semblent se concentrer exclusivement sur les voitures particulières. En effet, à l’exception de celui espagnol, les régimes annoncés sont remarquablement insuffisants en ce qui concerne les mesures indispensables pour le marché des véhicules industriels, qui a également chuté à un creux historique. L’ACEA exhorte donc les gouvernements et l’UE à inclure dans les plus brefs délais des programmes spécifiques de renouvellement du parc de véhicules lourds dans leurs plans de relance. »

Le directeur général de l’ACEA s’inquiète des bornes de recharges électriques pour les camions : « nous observons une tendance similaire à négliger les camions en ce qui concerne les plans de déploiement des points de recharge et des stations de ravitaillement. L’ACEA se félicite de l’accent mis sur les infrastructures pour les véhicules à moteur alternatif dans le plan de récupération des coronavirus annoncé par la Commission le mois dernier, et nous soutenons l’objectif de financer un million de points de recharge publics supplémentaires. Cependant, ceux qui y ont prêté attention savent que cet objectif faisait déjà partie de l’accord vert européen annoncé précédemment. De plus, cet objectif d’un million est clairement en deçà de ce qui sera nécessaire. Selon les propres calculs de la Commission, environ 2,8 millions de bornes de recharge accessibles au public seront nécessaires d’ici 2030 – soit environ 15 fois plus que ce qui est actuellement en place dans l’UE. »

« Il ne faut pas oublier les poids lourds, car les camions et les bus ont des besoins très différents des voitures particulières en matière d’infrastructures. Pensez par exemple à leur demande de puissance et d’énergie plus élevée, ainsi qu’à leurs besoins spécifiques de stationnement (pour la recharge de nuit), d’espace et d’accès. Le besoin urgent d’une infrastructure spécifique aux camions est également quelque chose dont j’ai discuté avec Peter Carlsson – PDG de Northvolt, la société suédoise qui produit des batteries pour véhicules électriques – plus tôt ce mois-ci » a indiqué Eric-Mark Huitema.

Une révision de la directive sur les infrastructures

Le directeur général propose une révision de la directive sur les infrastructures de carburants alternatifs qui ne spécifie aucun objectif pour le déploiement de points de recharge ni de stations de ravitaillement adaptées aux camions, à l’exception du GNL qui l’est. « La révision de la directive devrait donc également introduire des objectifs contraignants pour tous les États membres pour les infrastructures de véhicules lourds, couvrant l’électricité, le gaz et l’hydrogène » a-t-il souligné.

Il a rappelé les objectifs CO2 pour les poids lourds « fixant des jalons extrêmement difficiles sur la voie de la neutralité carbone : -15% de CO2 d’ici 2025 et -30% d’ici 2030. Pour réaliser ces réductions importantes , Les fabricants de camions européens mettent sur le marché un nombre croissant de camions zéro émission » a-t-il précisé. Mais le DG de l’ACEA a estimé clairement que « la plupart des camions vendus en Europe fonctionnent toujours au diesel, car c’est le transporteur d’énergie le plus pratique et le plus rentable disponible pour les opérateurs de transport ». Les chiffres de l’ACEA montrent que 97,9% de tous les camions vendus en 2019 roulaient au diesel, 0,1% roulaient à l’essence, 1,7% roulaient au gaz naturel, 0,2% étaient électriquement rechargeables et 0,1% étaient hybrides électriques.

« L’industrie du camion est actuellement aux prises avec les effets de la crise du COVID-19, même si les décideurs politiques et les médias semblent avoir davantage l’œil sur les voitures particulières de nos jours. Néanmoins, les constructeurs de camions européens gardent en vue les objectifs climatiques à long terme. Ni l’industrie des camions ni les décideurs ne peuvent se permettre de laisser tomber la balle là-dessus en ce moment » a conclu Eric-Mark Huitema.

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