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Transport combiné : le rail-route reprend des couleurs

Le président du GNTC (Groupement national des transports combinés), Dominique Denormandie, constate un bon alignement des planètes pour la croissance du transport combiné rail-route. Le secteur représente 25 % du fret ferroviaire en France et dispose d’atouts écologiques, économiques et sociaux colossaux. La SITL (26 au 28 mars) a été l’occasion de faire passer les messages de la profession et de mettre en avant les atouts du secteur auprès des pouvoirs publics et des chargeurs. Tour d’horizon et décryptage.

A la différence du fret ferroviaire, le transport combiné se porte bien en France. « La dynamique est bonne,  les opérateurs, les ports et les transporteurs routiers s’intéressent de plus en plus au transport combiné, se félicite Dominique Denormandie, le président du GNTC (Groupement national des transports combinés). En parallèle, nous constatons une collaboration active entre notre groupement et le gestionnaire des infrastructures ferroviaires, SNCF Réseau. Un coup d’accélérateur a été mis, il y a une vraie volonté d’accentuer les efforts. »

Aurélien Barbé, délégué général du GNTC, et Dominique Denormandie, président du GNTC

Patrick Jeantet, le PDG de SNCF Réseau, a décidé d’agir. Dans le cadre de la nouvelle organisation décidée en 2018, SNCF Réseau s’est-enfin-doté d’une structure consacrée au dialogue avec les opérateurs ferroviaires et leurs clients. L’objectif est d’augmenter la qualité de service, le nerf de la guerre, mais également d’anticiper au maximum leurs besoins de circulation afin de programmer en amont le nombre de sillons nécessaires. En parallèle, le volume des investissements pour rénover les infrastructures dédiées au transport de marchandises (gares de triage et voies de service) a été porté à 100 millions d’euros sur la période 2019-2024.

Un plan national pour la création et le suivi des plateformes

« Avec une part de marché de 25 %, soit environ 1400 trains /jours, le combiné est le seul secteur du fret ferroviaire qui se développe de manière aussi importante, note Dominique Denormandie.  Il y a 5 000 entreprises de transport que le combiné pourrait intéresser mais seulement 150 qui le pratique aujourd’hui. »

Dans ce contexte, le GNTC a rédigé 10 propositions dans le cadre du grand débat national pour soutenir le secteur et lever les freins au développement de l’intermodalité qui demeurent importants (encadré ci-dessous). Trois propositions paraissent prioritaires :

-Proposition numéro 1 :  un plan national stratégique pour la création et le suivi des plateformes de transport combiné.  « Le partenariat avec SNCF Réseau existe déjà sur des projets de création de plateformes de transport combiné, expose Aurélien Barbé, le délégué général du GNTC. Nous sommes consultés pour émettre un avis consultatif sur le business (besoins, flux). Dans un second temps, nous appelons de nos vœux le lancement d’un grand plan stratégique national avec SNCF Réseau, l’Etat, les  grands acteurs pour élaborer une vision globale et cohérente des plateformes de combiné. » Dit autrement, il s’agit d’instaurer un plan avec des investissements et des axes géographiques dédiés. « Il faut cesser de gaspiller l’argent du contribuable pour soutenir toute la filière, ajoute Dominique Denormandie. On ne peut pas laisser l’initiative de créer une plateforme aux seuls élus locaux. Il faut que les professionnels du combiné aient leur mot à dire sur les suggestions des élus. Par exemple,  on ne peut pas faire artificiellement du combiné avec des temps de pré et post acheminement trop longs. Même si le transporteur a des flux allers denses, il n’a pas forcément les flux retours. Il faut laisser l’initiative aux professionnels avec des chargeurs derrière, à raison de 3 trains / semaine au minimum, sinon cela n’est pas rentable. »

-Proposition numéro 2 : la création d’une ressource financière de valorisation de la tonne de CO2 économisée en faveur du report modal. Le combiné permet de reporter plus d’un million de camions sur le train chaque année et permet d’économiser plus d’un million de tonnes de CO2 par an. Afin de soutenir le report de la route vers le train ou la barge, le GNTC estime judicieux de créer des mécanismes financiers vertueux incitatifs en partenariat avec l’Ademe et la DGITM.

-Proposition numéro 5 : l’instauration d’une tarification des sillons justes et équitable. Le GNTC s’oppose à la nouvelle tarification des sillons au tonnage proposée par SNCF Réseau et validée par le gendarme du rail, l’ARAFER, pour 2019. «  Nous avons obtenu une tarification qui sera basée dorénavant sur l’inflation ordinaire, une mesure de bon sens, explique Dominique Denormandie. Mais nous considérons que la facturation du sillon au tonnage n’est pas normale car elle est contreproductive. » En effet, l’usure de l’infrastructure ne dépend pas seulement du tonnage, elle dépend d’autres critères comme la vitesse du train par exemple. Dans l’absolu, il pourrait devenir moins cher pour un opérateur de faire circuler 2 trains légers qu’un seul train lourd. Le GNTC proposera dans les prochains mois à l’ARAFER et à SNCF Réseau une nouvelle tarification juste et vertueuse pour 2020.

Pénurie de conducteurs et nouveau paradigme

En dépit d’un bon  alignement des planètes, le transport combiné est confronté à un véritable problème sociétal :  la pénurie de conducteurs. « Dans les  5 prochaines années, une étude du Comité national routier (CNR) montre que  100 000 conducteurs devront être recrutés pour la seule Pologne et 500 000 conducteurs dans toute l’Union européenne, pointe le président du GNTC. Le recrutement n’est pas suffisant et nous ne parvenons pas à fidéliser les nouveaux venus. Par exemple, nous avions jusqu’à présent un argument sympathique dans les entreprises de combiné : vous pourrez rentrer chez vous tous les soirs. Aujourd’hui, cet argument ne suffit plus, les jeunes ne veulent plus exercer ces métiers. »

En outre, le transport combiné devrait connaître un changement de paradigme pour la distance parcourue. « Nous estimons que le paradigme du transport combiné va se raccourcir, pronostique Dominique Denormandie. Nous sommes aujourd’hui sur une distance de 600 km. Une  étude européenne réalisée par l’Organisation ferroviaire mondiale (UIC) démontre que sur un trajet domestique en combiné rail-route, la distance moyenne se réduira à 400 km. Nous l’avions subodoré, le rapport de l’UIC le confirme. Les demandes des chargeurs commencent à aller dans ce sens.  La prestation en combiné est plus onéreuse mais les chargeurs ne trouvent pas aujourd’hui de transporteurs pour acheminer la marchandise.  Nous pouvons répondre en terme commercial mais pas encore au plan opérationnel. Nous sommes en phase laboratoire. »

Autant dire que le combiné a encore de belle marges de progrès devant lui !

Contribution du GNTC au grand débat national
  • Proposition n°1 : Un plan national stratégique pour la création et le suivi des plateformes combiné.
  • Proposition n°2 : La création d’une ressource financière de valorisation de la tonne de CO2 économisée en faveur du report modal.
  • Proposition n°3 : La mise en place de sillons dédiés pour le fret ferroviaire.
  • Proposition n°4 : Le renforcement de la qualité du service ferroviaire.
  • Proposition n°5 : L’instauration d’une tarification juste et équitable.
  • Proposition n°6 : La mise à niveau des infrastructures ferroviaires, notamment pour certains gabarits (P400).
  • Proposition n°7 : La mise en œuvre d’une dérogation de circulation de 5 % d’augmentation du PTRA (Poids total roulant autorisé) à 46 tonnes pour le transport combiné.
  • Proposition n°8 : Une pérennisation et une augmentation de l’aide dite « à la pince ».
  • Proposition n°9 : Le développement et le renforcement des Certificats d’économies d’énergie (CEE).
  • Proposition n°10 : L’instauration d’un régime unique et national de facturation de la manutention portuaire.

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