Coronavirus

TEMOIGNAGE : « la concurrence sera encore plus rude » (Istvau Szabo, routier hongrois)

Des collègues en quarantaine

Nous l’avions rencontré peu de temps avant l’épidémie du coronavirus. Istvau Szabo comme tous les conducteurs hongrois a été obligé de rentrer au pays. Depuis, il ne roule plus mais son employeur lui a versé son salaire de mars.

Istvau travaille pour un grand groupe, Kaposi International Transport, basé à Egervár, à une cinquantaine de la frontière avec l’Autriche. Le 16 mars, le dirigeant a appelé sa soixantaine de conducteurs en Espagne et en France leur donnant l’ordre de rentrer au plus vite. « Je m’en souviendrai toute ma vie. C’était comme la fin du monde » nous a rapporté le conducteur qui, en 30 ans de métier, n’avait jamais vu son patron dans un tel état. « Il paniquait car il avait peur que nous restions coincés moi en Espagne et mes collègues en France. 2 ont dû être rapatriés en avion, l’entreprise essaie de ramener leur camion immobilisé aux frontières. »

Depuis une dizaine d’années, Istvau Szabo fait ses allers et retours hebdomadaires entre Barcelone et Budapest. Il charge en Espagne son camion de plusieurs tonnes d’huile d’olive pour son pays. « C’était devenu une habitude et je me plaisais dans ce travail. En plus, l’ambiance était plutôt sympa avec les espagnols car il ne me considérait pas comme un routier de l’Est venu faire du cabotage. Moi, j’avais une ligne régulière et je ne faisais pas de transport sur leur territoire. »

Comme une punition

Notre conducteur hongrois a dû rester confiné quelques jours chez lui alors que 5 de ses collègues en provenance d’Italie ont été mis en quarantaine. « Ils n’ont pas eu le choix. Eux ne peuvent pas bouger. C’est dur pour eux. Ils le vivent comme une punition. Mais s’ils contaminent le reste des conducteurs, c’est la boite qui devra fermer ! » craint Istvau. Il a plus de chances, son patron estimant que l’Espagne n’était pas plus dangereuse que l’Italie à cette époque. Pourtant, depuis, la péninsule ibérique a rejoint les tristes chiffres de l’épidémie. « Au départ, autour de Barcelone, quand j’y allais, il y avait peu de protections dans les stations-services et les restaurants pour routiers. Ce sont souvent des établissements familiaux, tout le monde se connaît et toute le monde pense se faire confiance. Malheureusement, je connais quelques routiers et transporteurs espagnols malades. Moi, je n’ai rien attrapé. »

Le conducteur admet rouler quelques jours autour de l’entreprise mais rien d’essentiel pour pouvoir toucher des frais comme il gagnait lorsqu’il allait en Espagne. « Je pouvais me faire salaire et frais compris entre 1 500 et 2 000 euros chaque mois. Pour mars, la boite m’a payé 1 000 euros et aucun frais. Ce sera encore plus difficile pour le mois d’avril. Je n’ai travaillé pour l’instant que 3 jours ! »

Istvau pense que la concurrence sera encore plus rude après la pandémie. Alors que sa société ne fait peu de cabotage en France et en Espagne, il craint qu’il sera plus difficile de décrocher des transports, de nombreux transporteurs de l’Est devant fermer. « Nous serons moins nombreux et la plupart casseront encore plus les prix » regrette-t-il. Il y a de fortes chances que son patron perde sa ligne régulière de transport d’huile d’olive. Cela veut dire plus de travail pour lui.

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