Moyen-Orient

Episode 3. Ma vie au Moyen-Orient au volant d’un camion

Nous retrouvons Jean-Louis Delarue, notre routier qui fut partie de ces lignards du Moyen-Orient. Lors des épisodes 1 et 2, Double-Mètre (son nom de route) nous a détaillé ses débuts dans le métier et ses premiers kilomètres pour le compte de Stouff, un nom collé à jamais aux souvenirs des routiers au Moyen-Orient.

Des bons et moins bons souvenirs

Le parcours Italien se passa sans aucun problème majeur, mis à part les embouteillages de Milan pour prendre l’autosdrada qui allait nous mener vers Venise, puis vers Trieste, et enfin vers Fernetti. Souvent en Italie, nous avions le droit en automne au brouillard. Beaucoup d’entre nous pensait à tord que le brouillard anglais était le summum, mais à mon avis ils n’ont jamais affronter les brouillards Italiens qui faisaient souvent plus de 80 kilomètres, et qui a couté la vie à Grand Routier que j’ai apprécié dans mon parcours. Il m’a donné des leçons de conduite ce qui m’a permis de devenir moi-même un grand routier, il s’appelait Monsieur Laheurte. Son accident à hauteur de Venise a eu lieu dans un brouillard à couper au couteau. Il roulait très lentement car la visibilité ne dépassait pas 10 mètres devant le pare-brise. Devant lui : un camion Italien qui transportait des pylônes électriques roulaient lui aussi très doucement. Malheureusement, les pylônes dépassaient largement de la longueur de sa semi-remorque et il avait comme balises des chiffons rouges invisibles dans ce brouillard. Et quand le chauffeur dut freiner brutalement, les feux stops de la semi sont restés invisibles à Monsieur Laheurte. Malgré sont freinage rapide, les pylônes ont pénétrés en force dans la cabine du Volvo, écrasant les jambes du conducteur. Et notre ami était diabétique et lors de son hospitalisation les médecins durent l’amputer d’une jambe. A son retour en France sa maladie gagna la deuxième jambe. J’ai appris son décès quelques temps plus tard, et j’ai perdu ce jour là un ami et surtout un homme de valeur.

Parfois, les rencontres que nous avions ne nous disaient pas que c’est la dernière fois que nous voyons certains d’entre nous. J’organise tous les ans une réunion d’ancien des Routes du Moyen Orient, parfois certains des participants ne reviennent pas l’année d’après. Il est vrai que nous avons l’âge de nos routes qui, à ce jour, ont bien changé. Tous ne sont pas partis sur la route, mais souvent pour cause de maladies diverses. Certaines de ces maladies sont surement dues à la vie que nous avons menée. Exemple : un appareil de chauffage de cabine a surement entrainé des années plus tard des maladies mortelles. Je parle du Termix, nous l’utilisions encore alors que certains pays tel, l’Allemagne avait interdit non seulement son utilisation, mais aussi interdisait le Termix dans le pays. Il était confisqué quand nous pénétrions dans ce pays. La raison : nous faisions rougir un plaque d’amiante toute la nuit par grand froid, à cette époque nous avions aussi des garnitures de frein en amiante et parfois quand nous suivions un confrère nous pouvions respirer les effluves des tambours de freins surchauffés.

Parfois me reviennent en mémoire des aventures, qui prêtent à sourire, qui sont drôles par l’interprétation qui en est faite. Un conducteur de chez Carry a eu un grave problème, mais sa copine, m’a donné un renseignement alors que je partais vers l’Irak. Elle m’a dit que son copain s’était brulé à 2 degrés. Françoise, la copine n’avait pas dû comprendre ou entendre la réalité de l’incident. Le conducteur avait comme souvent cassé la croute dans sa cabine, il était garé sur la station-service de Novara. Il a allumé son réchaud Camping Gaz, fait chauffer son repas, puis il a coupé son réchaud. Il a mangé, ensuite il est passé dans sa couchette, a passé une bonne nuit. A son réveil, il a comme beaucoup d’entre nous, sorti une cigarette et à allumé la clope, la cabine a explosé, il avait mal coupé la gaz. C’était un réchaud alimenté par une bouteille et non par une recharge. De plus, il avait eu quelques années plus tôt un accident qui lui avait valu d’être amputé d’une jambe, sa prothèse était en plastique. Il est sorti plus tard de l’hôpital avec une nouvelle jambe et a repris son métier.

A cette époque, la douane de passage de Fernetti était un simple baraquement au milieu de la route, et nous devions faire la queue, pour déposer nos documents. Une fois fait, nous allions faire nos dernières courses dans les boutiques qui entouraient cette douane. Il y avait non loin de cette douane, un restaurant le « Week End » qui avait dans son menu un plat que nous aimions, des jarrets de veaux, et chaque aller comme chaque retour, nous prenions le temps de prendre une douche, puis de nous restaurer dans ce restaurant. Tout le personnel de cet endroit nous connaissait, nous avons sûrement laissé des souvenirs impérissables dans l’esprit de ces personnes.

Il y avait plusieurs points de passages vers la Yougoslavie, le principal étant Fernetti, mais un autre Gorizia nous servait aussi de point de passage. Mais et surtout quand nous étions bloqués le week-end, nous passions par Pécs, dans cette douane, il y avait deux restaurants qui nous servaient des menus que nous apprécions. De plus, ce passage était plus calme que les deux autres points de passage. Par la suite, Fernetti devint beaucoup plus moderne, avec des bureaux modernes, un très grand parking, mais la lenteur était toujours de mise. Il nous fallait faire preuve de patience devant cette lenteur, une matinée voire une après midi pour passer cette douane. Juste à côté de cette douane, il y avait un camping, qui a joué pour certains d’entre nous un rôle de rencontre. Car cette époque était marquée par des Baba Cool qui prenaient la direction de Katmandou, sûrement pour aller regarder pousser de l’herbe qui poussait en faisant rêver jusqu’en France. Le matin, quand nous stationnions en attendant le bon vouloir des douaniers Italiens, nous faisions des rencontres de ces stoppeurs qui savaient où nous nous dirigions, et suivant notre bon vouloir nous acceptions ou pas de convoyer ces personnes, très baba cool. Je tiens à préciser que ce premier voyage vers là-bas s’est effectué en hiver, avec un départ au mois de décembre. Les italiens avaient aménagé une route qui nous conduisait directement au poste frontière de la Yougoslavie.

Jean-Louis Delarue

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *