Coronavirus

TEMOIGNAGE : « J’ai transformé un car en ambulance « (Thierry Schidler, Autocars Schidler)

Nous le vivons mal

Les entreprises de transport de voyageurs sont pratiquement toutes à l’arrêt. Plus aucun car ne circulent en France, aucune entreprise n’est épargnée. Thierry Schidler, autocariste à Bouzonville, en Moselle, a dû cesser pour la première fois l’activité de son entreprise en 90 ans d’existence.

« 2020 devait être une excellente année pour nous, nous avions 6 mois de commandes » déplore le dirigeant qui, normalement à cette époque, fait partir ses cars en voyages scolaires et linguistiques. « Nous le vivons mal. Tout s’est arrêté d’un coup. Les acomptes sont bloqués et les trésoreries sont fragiles. En plus, on n’a encore pas touché les remboursements des chômages partiels » précise le dirigeant qui a dû mettre tous ses conducteurs au confinement. « Même s’ils touchent 87% de leur rémunération, ils perdent plus de 13% de ce qu’ils gagnaient. Avec des primes de déplacement et de découché en moins, la perte avoisine les -25% pour eux. »

Depuis le 16 mars, ses 65 cars sont à l’arrêt, ou presque. Car notre autocariste a trouvé une idée originale en transformant l’un de ses cars en ambulance. Il a ainsi transporté 10 patients de Reims à Orléans où ils ont été admis dans un hôpital. « Nous avons transformé et équipé tout le car afin que les malades puissent voyager en toute sécurité sanitaire » nous a indiqué Thierry Schidler. Mais un second voyage entre Reims et Tours a échoué. « Le car est bien parti mais avant d’atteindre Paris le médecin a reçu l’ordre de faire demi-tour » regrette-t-il. Depuis, le transporteur a eu d’autres idées pour apporter son aide. « J’ai mis à disposition des mini-cars pour livrer des gels hydroalcooliques dans les pharmacies. Nous sommes intervenus aussi pour transporter des demandeurs d’asile qui était dispersés et pas du tout en confinement.»

Et enfin deux de ses cars ont bougé mardi dernier quand on lui a demandé de récupérer des français revenant d’une croisière à Marseille. Et hier 3 cars ont rapatrié des touristes d’une croisière Costa jusqu’à la frontière franco-belge. « Au moins, ils n’auront pas fait zéro kilomètre durant toute la pandémie. Il y aura toujours un autocar pour remplacer un autre mode de transport » se réjouit le chef d’entreprise.

Doubler le nombre de cars scolaires

Comment voit-il la reprise scolaire le 11 mai prochain ? « Nous avons très peu de précisions pour la reprise scolaire. Nous ne savons pas comment cela va se passer » constate Thierry Schidler qui prévoit cependant comment il va s’organiser. « La promiscuité est naturelle dans un car. Si on est obligé de limiter le nombre de passagers avec, par exemple, un siège sur deux, on va devoir doubler le nombre de cars. Et tous les transporteurs ne pourront le faire. Et l’autorité organisatrice va devoir payer le double puisque les véhicules seront deux fois plus nombreux » prévient-il.

Quant aux voyages linguistiques, « c’est fini » lance le transporteur qui précise : « la reprise dans les écoles sera consacrée aux études jusqu’à l’été, il n’y aura plus de places pour les voyages scolaires. » Même situation pour les seniors. « Si tout est fermé, les restaurants et les parcs, les anciens ne vont pas vouloir bouger. Et quand on a ciblé les enfants et les seniors, il y a les actifs. Et eux ne vont pas partir non plus, les entreprises et les industries doivent repartir en juillet et août » estime le transporteur qui ne voit pas de réelle reprise avant septembre. « Il va falloir être patient et attendre la rentrée. Et même, à cette époque, l’activité sera moindre. Il faudra attendre vraiment l’année prochaine » prévoit le dirigeant.

Pour Thierry Schidler, « nous allons assister à un spectacle de désolation quand le confinement sera terminé. On ne sait pas comment on va repartir, comment les gens vont se comporter. En réalité, nous vivons une guerre mais c’est une guerre sans bombes. Quand on va sortir de nos cachettes, on va voir un monde totalement différent. » Et pour le transporteur, les individus vont changer leurs modes de déplacement. « Les avions ne pourront plus voler comme avant et les autocars vont être le relais des avions surtout low-cost » estime l’autocariste qui pense qu’il y aura une redistribution des cartes dans le transport de personnes.

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