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Voici pourquoi des centaines de routiers français ne pourront pas réveillonner ce soir

Le ministère des transports avait pourtant annoncé un dispositif spécifique pour les routiers pour faire repartir les flux de marchandises entre la Grande-Bretagne et la France. Or, sur le terrain, la situation reste catastrophique. La plupart des conducteurs sont parqués à plusieurs endroits en amont de Douvres sans qu’ils ne reçoivent aucune information et sans aucune possibilité de se nourrir et de se laver. Nous avons pu contacter quelques-uns toujours bloqués à quelques heures du réveillon. Selon nos informations, 2 500 routiers français seraient encore bloqués en Grande-Bretagne.

En concertation avec Londres, le gouvernement avait annoncé le rétablissement des flux, en prévoyant une obligation de présentation de test PCR datant de moins de 72 heures, ou à défaut de test antigénique dont la liste est validée par le ministère français chargé de la santé. Or, les sites de tests qui n’ont ouvert qu’hier matin à 6 heures se comptent sur les doigts d’une main et la liste des tests antigéniques n’est pas communiquée à tous les sites. Conséquence : des conducteurs arrivent en France avec des tests invalides

Stéphane, conducteur chez Trénois, un transporteur du Nord, a débarqué en fin de matinée hier avec un test non « listée » par le ministère français de la santé. « J’ai dû attendre trois heures à Calais. Nous étions une vingtaine avec le mauvais test. Mais les autorités n’ont pas eu le choix, ils nous ont laissé partir de peur d’avoir des bouchons du côté français. Je pourrai réveillonner avec ma femme et mes deux enfants » se réjouit le routier. Ce qui ne sera malheureusement pas le cas de plusieurs centaines de conducteurs français qui n’ont toujours pas réussi à passer un test tant la file de camions est interminable du côté britannique.

Roger, 15 ans de Grande-Bretagne, est certain : ce sera son dernier voyage outre-Manche. « Je n’a jamais vu une telle situation. Pour la première fois en 15 ans, je ne pourrai pas passer Noël en famille » nous a confirmé par téléphone le conducteur toujours bloqué sur une aire d’autoroute en amont de Douvres. « J’ai avancé de 4 mètres en deux jours. Et on nous dit rien ! Même mon patron n’a aucune information de la part des autorités françaises. C’est une honte ! » s’est exclamé Roger qui ne s’est pas lavé depuis dimanche et qui s’est nourri grâce à la solidarité de routiers étrangers.

« Tout le monde nous dit de venir ici et juste d’attendre mais nous ne voulons pas attendre!» déplore un polonais, Ezdrasz Szwaja, interrogé par l’AFP sur l’ancien aéroport de Manston, où doivent se dérouler les tests et où 3 800 camions sont stationnés. « Ils disent qu’il y aura un test Covid pour nous mais rien ne vient. Nous n’avons aucune information, rien», poursuit-il, très ému. « J’ai deux très petits enfants, une femme, je veux juste aller là rejoindre, en Pologne. »

Hier, ils n’étaient qu’une vingtaine de poids lourds a avoir pu traverser la Manche via le Tunnel sous la Manche, le lancement des tests n’ayant commencé que très tard. Il a fallu attendre la fin d’après-midi pour qu’un flux de camions ne commence réellement à emprunter Eurotunnel. Certains routiers parlent d’une fréquence de 6 routiers testés par heure.

Les syndicats ne décolèrent pas, ils n’ont toujours pas digéré l’annulation en dernière minute de la réunion prévue mardi soir avec le ministre des transports. Comme nous le confiait Patrice Clos, secrétaire général de FO Transports, « Les tests sont payants et très chers. Certains conducteurs n’ont plus d’argent. Et il n’y a rien dans la convention collective qui dit que cela doit être remboursé par l’employeur. »

« Une situation humainement difficile pour les conducteurs à court terme, mais un enjeu majeur à moyen terme pour la pérennité des flux transmanche notamment à 8 jours du Brexit » alertent les fédérations du transport routier (FNTR, TLF, OTRE, UNOSTRA) dans un communiqué commun. Le patronat exige une libre circulation des marchandises “comme cela a été la règle depuis le début de cette pandémie, avec application du protocole sanitaire que les entreprises et leurs salariés appliquent scrupuleusement depuis de nombreux mois” indique l’OTRE. “Ce n’est pas faute de l’avoir demandé et ce ne sera pas faute de le rappeler encore auprès des autorités françaises.”

Selon les autorités britanniques, il faudra encore plusieurs jours pour que tous les camions passent la Manche. Côté français, la seule réponse est la réaction du ministre des transports, Jean-Baptiste Djebbari, sur Twitter s’adressant aux routiers : « Nous sommes mobilisés pour que le plus grand nombre d’entre vous puisse rentrer passer les fêtes de Noël en famille. »

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