Camions

Volvo accélère la cadence de la production des électriques dans l’usine de Blainville-sur-Orne

Photo @ JP Pastre

L’usine de Blainville-sur-Orne produit les Renault Trucks D et D Wide Z.E ainsi que les Volvo FL et FE Electric. Elle se prépare à une douce montée en cadence autour des véhicules à batteries.

A l’occasion d’une visite des équipes de direction accompagnant Jean-Yves Gautier , président de GFS basé à Noyal-sur-Vilaine, Volvo Trucks France a entrouvert les portes de l’usine de Blainville-sur-Orne à quelques encablures de Caen-la-Mer (Calvados). Ceci s’explique par le fait que la famille Gautier soit cliente Volvo depuis 1964 ! Quant à GFS, elle a fait l’acquisition d’un premier lot de 3 Volvo FL Electric.

C’est le premier client à voir la chaîne de production des gammes électriques produites à Blainville-sur-Orne. En effet, l’assemblage final et « l’activation » des véhicules se fait dans un hall dédié. Une production marginale face aux 15 000 camions produits sur le site. Lequel réalise bien davantage de cabines puisqu’on y effectue le ferrage, la peinture et l’assemblage final des cabines des DAF LF, Renault D et D Wide, C, K , T, Volvo FL et FE !

Le site de Blainville-sur-Orne -héritage de la Saviem- a même célébré tout dernièrement le million de cabines produites depuis 1957 (elle en a même fabriqué par le passé pour Magirus Deutz et Mack-). Face à ce chiffre impressionnant, les 330 camions électriques à batteries produits en 2021 paraissent peser bien peu (à ce jour, suivant une balance de 50% de Renault Trucks et 50% de Volvo Trucks). Mais Volvo Trucks anticipe une production portant à 50% sur des véhicules électriques en 2030.

La ligne d’assemblage final des véhicules électriques à batteries de Blainville-sur-Orne. On y branche tous les circuits “courants forts” après avoir fixé les packs de batteries (qui pèsent 550kg chacun). Puis il est procédé à l’initialisation et à la mise en route. Un protocole plus complexe que pour un véhicule thermique. Photo @ JP Pastre

2 000 camions par an

Le nouveau hall d’assemblage final dédié aux camions à batteries, mis en service en septembre 2021 a une capacité de 9 unités par jour avec deux équipes de 15 personnes. La capacité de production de cet atelier d’assemblage final dédié 100% aux électriques à batteries est de 2 000 unités/an. Une goutte d’eau face aux 15 000 camions qui sortent annuellement des lignes de Blainville-sur-Orne.

Si un camion « thermique » passe sur chaque étape de la chaîne d’assemblage sur une cadence de 5 minutes par atelier, il n’est pas question de chaîne de montage pour l’assemblage final des électriques. Ils exigent déjà une demi-journée d’assemblage pour le Modular Power Box, « coeur » des camions électriques Renault Trucks Z.E et Volvo FL/FE Electriques.

Singularité de cette unité : elle concentre toutes les fonctions de refroidissement, de gestion de la charge, les convertisseurs de courant et le moteur électrique avec sa transmission à 2 rapports. Le tout avec un encombrement identique à celui d’un moteur thermique conventionnel. Ceci pour faciliter les montages en ligne.

Le hall final dédié sert au montage des packs batteries avec leur branchements haute-tension sous 600 V (550kg par pack tout de même, sachant que l’on peut aller jusqu’à 6 à bord sur les plus grands FL 4×2). Ici les cycles de montage sont très différents : comptez 3 heures par étape dans ce hall. Pour cette raison, cet atelier n’accueille que du personnel habilité « courants forts » et dispose de très impressionnantes installations d’extinction incendie par aspersion (ou sprinklers).

Une station de charge, jusqu’à 160kW de puissance, est située à proximité immédiate. Les camions sont chargés à plein une fois les tests de « mise à la route » effectués pour pouvoir être manutentionnés, emmenés chez les carrossiers, puis être livrés dans le réseau. Les packs batteries, en provenance de l’usine Volvo Trucks de Gand (Belgique) sont initialement chargés à seulement 25% pour limiter la quantité d’énergie à bord pendant le transport (un sujet sensible en terme de sécurité en raison des craintes liées aux emballements thermiques des cellules lithium-ion). Détail insolite : les roues complètes, montées et équilibrées des camions réalisés à Blainville-sur-Orne viennent toutes de la même usine de Gand (mystères de la logistique).

Modular Power Box, ou l’ensemble des fonctions de contrôle thermique des batteries, convertisseurs de courant, électronique de commande, chargeurs réunis dans un volume similaire à celui d’un bloc thermique conventionnel. Cela facilite l’implantation dans le châssis et sous la cabine des renault Trucks D et D Wide Z.E ou des Volvo FL et FE Electric. Photo @ JP Pastre

Un choix politique, pour une demande politique

A l’image des constructeurs pressés par l’Europe de passer (de gré ou de force) à l’électrique d’ici à 2030, les clients finaux sont aussi soumis à des pressions politiques et réglementaires, à commencer par les ZFE-m réinterprétation technocratique des barrières d’octroi d’antan. Jean-Yves Gautier Président de GFS le confie volontiers : « le premier FL Electrique pour GFS est issu d’une charte avec la municipalité de Rennes ». Il sera destiné aux usages purement urbains, à raison de tournées quotidiennes de 120 à 170 km et remplace directement un équivalent thermique.

La recharge se fait à quai via une WallBox de 22kW en utilisant simplement le chargeur embarqué monté en série sur le Volvo FE Electric (et son clone le Renault Trucks D Z.E). Cela signifie un temps de charge de 10 heures. Mais les tournées se faisant sur deux tours (7h à 12h30 puis de 13h30 à 17h30) cela n’a pas d’impact à ce stade sur l’exploitation. Une utilisation d’ailleurs très particulière puisque ces véhicules à batteries feront entre 30 000 et 50 000 km/an en distribution urbaine, avec une durée de détention estimée de 10 à 12 ans. Or la garantie d’atteindre à minima les 80% de la capacité de stockage électrique nominale (State-of-Charge ou SOC) n’est valable que dans la durée du contrat Gold Volvo Truck Services. “Un contrat Gold peut aller au-delà de 8 ans et donc contiendra un remplacement de batteries pour garantir un minimum de 80% de la capacité de stockage électrique nominale” a précisé le constructeur.

Originalité du choix de GFS : l’achat des véhicules avec un prêt bancaire classique. Un sacré pari puisque l’on parle de machines atteignant les 300 000€/pièce (avec la carrosserie fourgon d’origine Regnault et un hayon Dhollandia électro-hydraulique rétractable). Les représentants de GFS ne s’en cachent pas : « le premier Volvo FL Electrique, à notre propre initiative, nous a fait de la publicité ». « Pour le deuxième, il a fallu que l’on trouve le client qui en accepte le surcoût (en l’espèce Michelin). Le troisième nous apportera un chiffre d’affaires supplémentaire » poursuivent-ils. Mais le directeur de l’Exploitation de GFS en est conscient : « Ces trois camions sont là pour nous préparer aux futures ZFE ».

« L’électrique est un grand changement pour nos clients mais nous sommes prêts et les accompagnons tout au long de leur projet : de la définition de leur véhicule, la compatibilité aves l’usage et la solution pour la recharge » estime Jérôme Flassayer, responsable des énergies alternatives chez Volvo Trucks France. « Il faut accompagner cette transition avec des aides et c’est ce que fait l’Etat car ces technologies seront durablement plus chères que ce que nous avons connu » a-t-il ajouté.

Pour passer d’un hall à l’autre, les modèles électriques sont pris en remorque. Le moteur avec son Modular Power Box est installé mais pas les batteries. Cela sera pour l’étape suivante, la dernière avant mise à la route. Photo @ JP Pastre

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